vendredi 3 octobre 2014

Louvain-la-Neuve. L'église Saint-François a 30 ans



Elle fut inaugurée le 7 octobre 1984. Il y eut de longues discussions autour de son nom. Il me semble qu'il y avait "Notre-Dame" dans le trio de noms proposés. Saint-François l'emporta. Je n'ai plus de souvenirs précis. Quelqu’un en a-t-il ?
Cela m’amène à réfléchir sur la place des églises dans le milieu universitaire UCL depuis 60 ans. D’autres que moi ont certainement une vision différente. Les commentaires sont ouverts. 
Louvain-la-Neuve d’abord.
Depuis la construction de Notre-Dame d'Espérance à Bruyères, je lui ai toujours préféré cette dernière église, plus légère, plus conviviale, ... avec des bancs courbes encerclant un autel central.  Un lieu où l'on voit à la fois l'assemblée et la « table mise ». Un accès pratique pour les personnes avec un handicap ou subissant les problèmes de mobilité liés à l’âge.
Saint-François. Quand on a fait le choix de l’architecte Jean Cosse, qui s'était déjà fait connaitre par l'église de Saint-Joseph à Waterloo et d’autres réalisations, on avait espéré une "église maison", hospitalière comme un foyer familial. Pour moi Saint-François a davantage l'allure d'une forteresse, avec ses angles acérés, son donjon. L'orientation des sièges amène à regarder droit devant soi. Les murs ne se font pas oublier. Cela reste une très belle église. Mais un peu le symbole de ces églises fortifiées de Thiérache http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89glises_fortifi%C3%A9es_de_Thi%C3%A9rache Pour défendre quoi ? Quelle église pour quoi ?
J'avais bien aimé la chapelle de la Source, sa ligne claire, sa sobriété. J'apprécie que Saint-François et la Source soient des lieux de culte "du bord du chemin".
Chacune des églises de Leuven et Louvain-la-Neuve exprime-t-elle une ecclésiologie spécifique ?
À Leuven avant l’émergence de la Paroisse Universitaire puis de la Communion de Louvain, les membres de l’UCL fréquentaient les églises, longtemps bilingues, de la ville historique. Certains avaient leurs habitudes dans les lieux de culte de la multitude d’ordres et congrégations religieuses présentes dans la cité. Au milieu des années 50, quelques églises étaient plus facilement accessibles aux francophones. L’église décanale de Saint-Pierre (longtemps le chœur seulement était utilisable à cause de travaux de restauration) et l’église Saint-Michel, proche de la Grande Rotonde.
C’étaient des lieux privilégiés pour des messes et sermons d’Avent et de Carême. Lorsque Jean-Maurice Servais, responsable des affaires religieuses à l’UG (ancêtre de l’AGL) commença à coordonner de nombreuses initiatives dispersées, ce fut Saint-Michel qui accueillit les liturgies francophones (avec de nombreuses transgressions de la règle du latin universel). Le curé était accueillant mais chiche. Des lampes de quelques dizaines de watts (40 watts si je me souviens bien) éclairaient la vaste église.
Vers 1958, un prêtre nommé par les évêques, Pierre De Guchteneere, encore connu à Lima en 2014 sous le nom de Padre Pedro, occupa une petite maison communautaire à la Muntstraat (rue de la Monnaie). Un ancien café. On parlait aussi, non officiellement, de Centre Saint-François.
Plus tard l’UCL accueillit la communauté catholique universitaire dans deux maisons siamoises à la Place Hoover 9 et 10. Il avait une chapelle au sein d’une maison communautaire « multigénérationnelle », le Centre Religieux Universitaire ou plus brièvement le CRU. Lorsqu’en 1974 l’aumônerie devint une Paroisse officielle elle prit possession de la superbe église de Notre-Dame-aux-Dominicains (Predikheren) dans le quartier Médecine de Leuven, sur une ancienne île de la Dyle. Et reçut de façon inattendue, Mgr Pierre Goossens comme curé.
Il avait été vicaire général à Bruxelles, il se fit « primus inter pares », au milieu d’une équipe sacerdotale et ensuite pastorale, femmes et hommes, laïcs et prêtres. La Paroisse Universitaire afficha son ecclésiologie en tant « communion de communautés ». La cellule de base était le petit groupe : maison communautaire (ancêtre des Kots-à-projet de LLN), équipe biblique, fraternité de Foucauld, équipe de foyers, mission de Pâques en France ou ailleurs, …  Avec l’abondance de prêtres à Leuven à l’époque, l’eucharistie de base était souvent une eucharistie domestique. À la table de réunion, sur les planches posées sur un tréteau, à l’étape d’une marche. Des grandes et belles liturgies réunissaient la paroisse le mercredi soir et le dimanche matin dans l’antique nef de Notre-Dame. Le mercredi, après messe, on se dispersait pour souper dans les maisons communautaires du quartier. Parmi les commus (je commets un anachronisme), il y avait le CRU, aiguillon pour l’UCL et les chrétiens belges. On y espérait que dans les années 70, hommes et femmes auraient accès de façon égale à toutes les fonctions ecclésiales.
Pour le transfert à Woluwe et Louvain-la-Neuve on avait prévu que les lieux de culte se développeraient progressivement, au fur et à mesure des constructions et des migrations, en n’abandonnant pas les décisions importantes aux facultés scientifiques pionnières de la ville nouvelle, que pendant le déménagement il resterait une équipe unique à la tête de la paroisse, que les prêtres tourneraient de lieu en lieu, … On s’inquiétait des paroles de certains professeurs qui proclamaient « une université catholique arrivant en Wallonie doit planter son drapeau ». Quelques-uns rêvaient d’une cathédrale alors que les chrétiens louvanistes recherchaient plutôt une « église servante et pauvre ».
Coup de théâtre. On apprit que les évêques et les autorités de l’UCL avaient décidé de faire table rase de l’expérience ecclésiale de Leuven. Que l’on recommençait tout à zéro, que Mgr Goossens ne pourrait pas venir habiter LLN (après négociation on lui avait promis de prendre un siège dans le dernier train du transfert mais quand il fut sur le quai avec les ultimes étudiants on lui dit que son ticket était périmé mais qu’il y avait un bus pour Woluwe-saint-Pierre), … L’équipe constituée à Leuven s’arrêtait là sauf pour un de ses membres. Voilà ! c’est l’histoire. « Le Seigneur me l’a donné, le Seigneur me l’a repris, béni soit le Seigneur ». Une paroisse plus conservatrice s’était manifestée à Leuven, autour du Carmel, et la réconciliation demandait que les deux courants disparaissent.
Malgré les pressions du Vice-recteur De Vroede, une équipe venant du CRU Leuven s’installa à Louvain-la-Neuve (à l’emplacement de la Luxembourgeoise actuelle). Elle pensait jouer un rôle comparable à celui que le CRU jouait à Leuven, à la fois hébergeant des fonctions au service de la paroisse et gardant sa réputation d’aiguillon, dans les relations hommes-femmes, la bioéthique, les solidarités internationales, … Elle pensait.
Une chapelle était prévue au CRU. Elle est devenue le bar de la Luxembourgeoise. En entrant dans la maison à droite il y avait un petit espace de méditation avec une Bible et quelques livres. Un mariage au moins fut célébré dans la chapelle du CRU.
La tradition de l’eucharistie de terrain s’estompa peu à peu. La « première messe » lors du camp international du Biéreau eut lieu dans la salle à manger du fermier Roussel, au mois d’aout 1972. Avant la messe on lui demanda une assiette sans lui indiquer son usage. Il entra par hasard au moment de la consécration. On le crut choqué mais à la fin de la célébration il dit « si j’avais su que c’était pour cela je vous aurais donné une plus belle assiette ». Dans la tradition du vieux Louvain, on célébra le baptême d’un petit Vekemans, qui habitait au-dessus de la Maison des Sciences (alors le Maphys) sous l’arbre devant l’entrée (derrière le mur à bandes dessinées). En plus de chants liturgiques on n’oublia pas le chant récemment sorti de Maxime Le Forestier, « comme un arbre dans la ville ».
Autour de Raymond Thysman, la paroisse se fit nomade. Célébration au couvent des Annonciades ; Ensuite dans un local de l’école primaire, Collège du Biéreau, dont les cours avaient commencé bien avant ceux de l’UCL. Puis ce fut pendant quelques années le hall des autorités de l’UCL dans leur pied-à-terre au-dessus de la Poste (à côté du Post actuel).
Une chapelle plus permanente devenait urgente. La place des Wallons, que les urbanistes nous annonçaient comme une douillette « chambre urbaine », laissait un espace à quelques pavés blancs du Cercle Industriel. On y lova une sympathique chapelle, la Source. Un peu comme un rocher ralentissant le torrent d’étudiants qui après les cours dévalent aujourd’hui la rue des Wallons vers la gare. Il faut pagayer habilement pour arriver à tourner dans le flux. Une chapelle au bord d’un torrent impétueux. Une image de l’Église ?
En même temps il fallait songer à une église plus définitive, dans les environs de la Grand-Place. Sur la place elle-même avec une promenade le long du lac après la messe dominicale ? Y aurait-il un jour un bâtiment communal sur ce lieu symbolique ? Il n’y eut ni Hôtel de Ville ni Cathédrale, il y eut la Faculté de Théologie.
L’église Saint-François se hissa telle une tour du garde sur un éperon rocheux. Il y a trente ans déjà. Bientôt la rue de l’Hocaille ne se perdra plus dans les chicanes ou les barbacanes. Elle débouchera sur les nouveaux logements du projet Agora. L’église se retrouvera en bordure des constructions de la dalle.
C’était un petit texte pour évoquer les lieux de culte proches de l’UCL pendant la soixantaine d’années que j’ai connue. À vous de le compléter, éventuellement de le retoucher.
Chacun aura pu constater que je suis de "mauvaise foi". J'ai la nostalgie de notre église Notre-Dame dans les vieux quartiers de Leuven, je passe presque quotidiennement devant la Source et j'aime la paix dominicale et l'espace lumineux de Notre-Dame d'Espérance. Mais j'ai vécu de grands moments à Saint-François. Les prémices de Serge Maucq, les funérailles de Michel Woitrin, d'Yves du Monceau, de Victor Mendez... Quelques belles homélies, des intentions de prière universelle, ... J'essaie d'oublier les murs. 
On peut aussi m'envoyer des commentaires par mail sur paulthielen@gmail.com 
 https://plus.google.com/photos/110075015355556431360/albums/5898198151542752721 Un événement : la messe de prémices de Serge Maucq

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